LETTRE DU CABINET – JUIN 2021

LETTRE DU CABINET – JUIN 2021

Posted by Cabinet Gil-Fourrier & Cros in Non classé 25 Juin 2021

Actualités de jurisprudence en droit de l’urbanisme et de l’environnement

* CE, Avis, 21 juin 2021, Association La Nature en Ville, n°446662.
Par son avis du 21 juin 2021, le Conseil d’État précise que lorsqu’un projet de construction implique l’atteinte ou l’abattage d’un ou plusieurs arbres composant une allée ou un alignement le long d’une voie de communication, l’autorisation d’urbanisme peut valoir dérogation à l’interdiction d’abattre ou de porter atteinte aux arbres prévue au titre de l’article L. 350-3 du code de l’environnement.
Dans cette hypothèse, « il appartient à l’autorité administrative compétente pour délivrer l’autorisation d’urbanisme ou statuer sur la déclaration préalable de s’assurer, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, de la nécessité de l’abattage ou de l’atteinte portée aux arbres pour les besoins du projet de construction ainsi que de l’existence de mesures de compensation appropriées et suffisantes à la charge du pétitionnaire ou du maître d’ouvrage ».

* CE, 31 mai 2021, SAS Castorama, n°434542.
L’administration ne peut librement choisir entre l’édiction de prescriptions spéciales assortissant une autorisation et le refus d’autorisation (1). S’il est possible de délivrer l’autorisation en l’assortissant de prescriptions adéquates pour assurer la conformité du projet aux intérêts en présence, l’autorité compétente doit le faire.
Le premier jalon de cet axiome a été posé avec l’arrêt Deville (2) par lequel le Conseil d’État précisait qu’un refus de permis de construire sur le fondement de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme au titre du risque d’atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique, ne pouvait être légalement envisagé, qu’à la condition que le projet ne puisse pas être accordé en l’assortissant de prescriptions spéciales.
Par un arrêt du 31 mai 2021, le Conseil d’État a appliqué ce mécanisme aux autorisations ICPE et autorisations environnementales en précisant que « lorsque la construction et le fonctionnement d’une installation classée pour la protection de l’environnement nécessitent la délivrance d’une dérogation au titre de l’article L. 411-2 du même code, les conditions d’octroi de cette dérogation contribuent à l’objectif de protection de la nature mentionné à son article L. 511-1. Pour autant, lorsqu’elles lui apparaissent nécessaires, eu égard aux particularités de la situation, pour assurer la protection des intérêts mentionnés à cet article, le préfet doit assortir l’autorisation d’exploiter qu’il délivre de prescriptions additionnelles. À cet égard, ce n’est que dans le cas où il estime, au vu d’une appréciation concrète de l’ensemble des caractéristiques de la situation qui lui est soumise et du projet pour lequel l’autorisation d’exploitation est sollicitée, que même l’édiction de telles prescriptions additionnelles ne permet pas d’assurer la conformité de l’exploitation aux dispositions de l’article L. 511-1 du code de l’environnement, qu’il ne peut légalement délivrer cette autorisation ».

* CE, 28 mai 2021, Époux V… et autres, n° 437429.
Le requérant dont l’action est rejetée, suite à la régularisation en cours d’instance de l’acte qu’il a déféré, doit il est regardé comme partie perdante au sens de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et supporter à ce titre la charge des frais de justice ?
En 2017, et par son arrêt Syndicat des copropriétaires de la résidence Butte Stendhal et autres (3), le Conseil d’Etat répondait positivement à la question en considérant que le requérant dont la requête tendant à l’annulation d’un permis de construire était rejetée, suite à la régularisation en cours d’instance par la délivrance d’un permis de construire modificatif, devait être regardé « la partie qui perd pour l’essentiel ».
Par son arrêt Époux V… et autres du 28 mai 2021, le Conseil d’État a infléchi la jurisprudence précitée. Ainsi, le requérant dont l’action a conduit à la régularisation de l’acte initialement entaché d’illégalité, mais dont la requête sera rejetée précisément à raison de cette régularisation, ne devrait plus être regardé comme la partie perdante condamnée au paiement des frais de justice.
En ce sens, le Conseil d’État précise que « la circonstance qu’au vu de la régularisation intervenue en cours d’instance, le juge rejette finalement les conclusions dirigées contre la décision initiale, dont le requérant était fondé à soutenir qu’elle était illégale et dont il est, par son recours, à l’origine de la régularisation, ne doit pas à elle seule, pour l’application de ces dispositions, conduire le juge à mettre les frais à sa charge ou à rejeter les conclusions qu’il présente à ce titre ».

(1) Olivier Fuchs, concl. sur CE, 22 juillet 2020, Société Altarea Cogedim IDF, n°426139.
(2) CE, 26 juin 2019, n°412429.
(3) CE, 19 juin 2017, Syndicat des copropriétaires de la résidence Butte Stendhal et autres, n°s 394677 397149